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Espaces vectoriels

Espace vectoriel : une présentation intuitive

Un espace vectoriel est un ensemble d'éléments $ \bf{x}{,\vec{y},\dots$, appelés vecteurs, sur lequel sont définis les opérations linéaires : une addition et une multiplication par un scalaire (un nombre réel ou complexe), avec les règles usuelles liées à la notion d'addition et de multiplication :associativité, commutativité, élément neutre, transitivité,...

Dans le jargon mathématicien l'addition désigne une opération interne entre deux vecteurs donnant un vecteur, tandis que la multiplication est une opération externe entre un scalaire et un vecteur donnant encore un vecteur.

On parle d'espace vectoriel réel si les scalaires sont les nombres réels. De même, on parle d'espace vectoriel complexe si les scalaires sont les nombres complexes. Dans toute la suite, sauf mention contraire, les espaces vectoriels seront réels.

Exemples d'espace vectoriel

  1. Le premier exemple d'espace vectoriel réel est l'ensemble des nombres réels $ \mathbbm$R lui-même, avec évidemment les addition et multiplication usuelles. Dans ce cas particulier, les nombres réels sont à la fois considérés comme des scalaires et comme des vecteurs en tant qu'éléments de l'espace vectoriel.

    Il en va de même pour l'ensemble des nombres complexes $ \mathbbm$C. Cependant, dans ce cas, on peut distinguer deux possibilités : $ \mathbbm$C en tant qu'espace vectoriel complexe, ou bien $ \mathbbm$C en tant qu'espace vectoriel réel (on parle de plan complexe pour cette dernière).

  2. Autre exemple, l'ensemble des fonctions définies sur un intervalle de I$ \mathbbm$R à valeur réelle: on définit naturellement l'addition de deux fonctions f et g par :

    h = f + g    ⇔    h(x) = f (x) + g(x)    ∀xI.

    La multiplication d'une fonction f par un scalaire λ est définie par

    h = λf    ⇔    h(x) = λf (x)    ∀xI.

En fait dans cet exemple, un point crucial est que l'addition est une opération interne : autrement dit, l'addition de deux fonctions doit encore être une fonction définie sur I à valeur réelle. Il en va de même pour la multiplication. C'est ce qu'on appelle la stabilité linéaire.

Une conséquence est qu'un espace vectoriel contient nécessairement un élément neutre pour l'addition, à savoir le vecteur nul.

Ainsi, le sous-ensemble des fonctions valant 1 en 0, n'est pas un espace vectoriel pour l'addition et la multiplication usuelle, puisque la fonction nulle n'en fait pas partie.

Espace vectoriel : la définition

Pour information et par souci de complétude, donnons la définition exacte et précise et abstraite3.1 de la notion d'espace vectorielle:

Définition 3.1.1   Soit E, un ensemble abstrait, muni d'une opération interne notée '+' et d'une opération externe notée '.' avec un scalaire réel (resp. complexe).

On dit que (E,' + ','.') possède une structure d'espace vectoriel sur $ \mathbbm$R (resp. sur $ \mathbbm$C) si les conditions suivantes sont satisfaites :

  1. $ \bf{x}{, \vec{y} \in E,$ $ \bf{x}{+\vec{y}\in E$
  2. $ \bf{x}{ \in E,$ λ$ \mathbbm$R (resp. $ \mathbbm$C), λ.$ \bf{x}{ \in E$
  3. $ \bf{x}{, \vec{y}, \vec{z} \in E,$ ($ \bf{x}{+\vec{y})+\vec{z} = \vec{x} + (\vec{y}+\vec{z})$
  4. $ \bf{x}{, \vec{y} \in E,$ $ \bf{x}{+\vec{y}= \vec{y}+\vec{x}$
  5. $ \bf{x}{ \in E,$ λ, μ$ \mathbbm$R (resp. $ \mathbbm$C), λμ.$ \bf{x}{ = \lambda.(\mu.\vec{x})$
  6. $ \bf{x}{, \vec{y} \in E,$ λ$ \mathbbm$R (resp. $ \mathbbm$C), λ.($ \bf{x}{+\vec{y})= \lambda . \vec{x}+ \lambda . \vec{y}$
  7. $ \bf{x}{ \in E,$ λ, μ$ \mathbbm$R (resp. $ \mathbbm$C), (λ + μ).$ \bf{x}{ = \lambda . \vec{x}+ \mu .\vec{x}$
  8. Il existe 0EE tel que $ \bf{x}{ \in E,$ $ \bf{x}{+
0_{E}=0_{E}+\vec{x}=\vec{x}$
  9. $ \bf{x}{ \in E,$ $ \bf{y}{ \in E$ tel que $ \bf{x}{+\vec{y}= 0_{E}$

Un élément d'un espace vectoriel est appelé vecteur, et nous choisissons de le noter avec une flèche.

Remarquons que la notion espace vectoriel est une notion de structure d'un ensemble muni d'opérateurs. On désigne usuellement de manière abusive (mais sans ambiguïté) l'espace vectoriel (E,' + ','.') tout simplement par E, car les opérations interne (addition) et externe (multiplication par un scalaire) sont généralement implicites et ne nécessitent pas d'être rappelées.

C'est bien ce que nous indiquions dans la sous-section précédente: un espace vectoriel est en gros un ensemble pour lequel est défini une addition et une multiplication par un scalaire.

Sous-espace vectoriel

Définition 3.1.2   Soit E un espace vectoriel réel et soit un sous-ensemble non vide XE. X est un [sous-]espace vectoriel réel s'il satisfait aux conditions de stabilité linéaire, c'est à dire :

$\displaystyle \bf{x}{+\vec{y}$ X
α$\displaystyle \bf{x}{ $ X

pour tout $ \bf{x}{,\vec{y} \in X$ et pour tout scalaire α$ \mathbbm$R.

Remarque 3.1.3   On a naturellement une définition analogue pour les sous-espaces d'espaces vectoriels complexe.

Par exemple, toute droite de $ \mathbbm$R2 passant par 0 est un sous-espace vectoriel de $ \mathbbm$R2 ou encore toute droite ou tout plan de $ \mathbbm$R3 passant par 0 est un sous-espace vectoriel de $ \mathbbm$R3.

Indépendance linéaire: vecteurs libres, vecteurs liés

Soit E un espace vectoriel (réel ou complexe) et soient p vecteurs $ \bf{x}{_{1},\vec{x}_{2},\dots,\vec{x}_{p}$. Si α1,..., αp sont des scalaires, alors on dit que le vecteur

α1$\displaystyle \bf{x}{_{1}+ \dots +\alpha_{p}\vec{x}_{p}$

est une combinaison linéaire des vecteurs $ \bf{x}{_{1},\dots,\vec{x}_{p}$.

Définition 3.1.4   On dit que les vecteurs $ \bf{x}{_{1},\vec{x}_{2},\dots,\vec{x}_{p}$ forment une famille libres, ou bien qu'ils sont linéairement indépendants si toute combinaison linéaire non nulle de ces vecteurs est nécessairement non nulle:

Si  α1$\displaystyle \bf{x}{_{1}+ \dots +\alpha_{p}\vec{x}_{p} =0
\;\mbox{ alors, }\;\alpha_{1}= \dots =\alpha_{p}=0. $

Définition 3.1.5   On dit que p vecteurs $ \bf{x}{_{1},\vec{x}_{2},\dots,\vec{x}_{p}$ sont liés si ils ne sont pas libres.

Proposition 3.1.6   Soit $ \bf{x}{_{1},\vec{x}_{2},\dots,\vec{x}_{p}$ une famille de p vecteurs. Si ces vecteurs sont libres (ou linéairement indépendants), alors la décomposition de

$\displaystyle \bf{x}{ = \alpha_{1}\vec{x}_{1}+ \dots +\alpha_{p}\vec{x}_{p}$

est unique.

Produit d'espaces vectoriels

Soient E1 et E2 deux espaces vectoriels réels (resp. complexes). On définit l'espace produit par l'ensemble

E1×E2 = $\displaystyle \left\{\vphantom{ (\vec{x_{1}},\vec{x_{2}}) \mbox{ tels que }
\vec{x_{1}}\in E_{1} \mbox{ et } \vec{x_{2}}\in E_{2} }\right.$($\displaystyle \bf{x_{1}}{,\vec{x_{2}}) \mbox{ tels que }
\vec{x_{1}}\in E_{1} \mbox{ et } \vec{x_{2}}\in E_{2} $$\displaystyle \left.\vphantom{ (\vec{x_{1}},\vec{x_{2}}) \mbox{ tels que }
\vec{x_{1}}\in E_{1} \mbox{ et } \vec{x_{2}}\in E_{2} }\right\}$.

On munit cet espace produit d'une addition et d'une multiplication induite par celles de E1 et de E2 :

\begin{equation*}\begin{aligned}
(\vec{x_{1}},\vec{x_{2}}) + (\vec{y_{1}},\vec{y...
...{x_{2}}) &= (\lambda\vec{x_{1}},\lambda\vec{x_{2}})
\end{aligned}\end{equation*}

Munis de ces opérations linéaires, l'espace produit E1×E2 est encore un espace vectoriel réel (resp. complexe).

Ainsi, par exemple on note $ \mathbbm$R2 = $ \mathbbm$R×$ \mathbbm$R et par récurrence :

$\displaystyle \mathbbm$Rn = $\displaystyle \mathbbm$R×$\displaystyle \mathbbm$Rn-1    ∀n = 2, 3,...


Cas des espaces $ \mathbbm$Rn et des espaces vectoriels réels de dimension finie

Définition 3.1.7   On dit qu'un espace vectoriel E est de dimension k s'il possède une famille libre de k vecteurs et que toute famille de k + 1 vecteurs est lié.

Définition 3.1.8   On dit qu'une famille B de vecteurs de E est génératrice ou encore que cette famille engendre E si tout vecteur de E est une combinaison linéaire des vecteurs de B.

Définition 3.1.9   Une base d'un espace vectoriel E est une famille libre et génératrice, c'est-à-dire qu'une base est constituée d'une famille de vecteurs linéairement indépendants et qui engendre E.

Ainsi, si B = ($ \bf{x}{_{1},\dots,\vec{x}_{n})$ est une base de E alors tout vecteur $ \bf{x}{$ de E se décompose de manière unique en une combinaison linéaire des vecteurs de la base B :

$\displaystyle \bf{x}{= \sum_{i=1}^{i=n} \alpha_{i}\vec{x}_{i}.$

Les coefficients α1,..., αn sont les coordonnées de $ \bf{x}{$ dans la base B.

Par exemple, la base de $ \mathbbm$Rn est constituée des vecteurs $ \bf{e}{_{i}=(0,\dots,1,\dots,0)$, dont toutes les coordonnées sont nulles sauf la ieme qui vaut 1.

Si $ \bf{x}{\in \mathbbm{R}^{n}$ avec $ \bf{x}{=(x_{1},\dots,x_{n})$, alors

$\displaystyle \bf{x}{= \sum_{i=1}^{i=n}x_{i} \vec{e}_{i}$

La base ($ \bf{e}{_{1},\dots, \vec{e}_{n})$ est appelée base canonique de $ \mathbbm$Rn.

On a alors de cette façon :

Théorème 3.1.10   L'espace $ \mathbbm$R est de dimension n. On note dim $ \mathbbm$Rn = n.

Théorème 3.1.11   Tout espace vectoriel de dimension n est isomorphe à $ \mathbbm$Rn.

Théorème 3.1.12   Soit E un espace vectoriel de dimension n.
  1. Une famille de n vecteurs de E engendre E si et seulement si c'est une famille libre.
  2. E possède au moins une base et toute base est constitué de n vecteurs.
  3. Si Y = ($ \bf{y}{_{1},\dots,\vec{y}_{m})$ ( 1≤mn) est un système libre de E, alors il existe une base de E contenant ce système. Autrement dit, on peut toujours compléter une famille libre en une base.

choi 2008-12-22